Communiqués de presse concernant l’utilisation des anticorps anti-CD3 (dirigés contre les lymphocytes). Il ne s’agit pas d’un vaccin à proprement parlé mais plutôt d’une immunosuppression ciblée qui permet, avant le stade de diabète, de reculer la survenue du diabète… Ce traitement a été approuvé par la FDA (agence du médicament américaine).
CONTRIBUTION D’UNE EQUIPE DE L’INEM
TEPLIZUMAB, la première biothérapie approuvée par la FDA pour le traitement du diabète insuline-dépendant
Une annonce très importante a été faite le 17 Novembre dernier par la Food and Drug Administration (FDA) qui a approuvé le premier traitement qui peut retarder – peut-être pendant des années – l’apparition du diabète de type 1 ou diabète insulino-dépendant, la maladie chronique la plus fréquente de l’enfant, qui apparaît aussi souvent chez les jeunes adultes. La fréquence de la maladie a beaucoup augmenté au cours des 30 dernières années, surtout chez le très jeune enfant (moins de cinq ans). Le nouveau médicament, teplizumab, est fabriqué par Provention Bio, qui s’associera à Sanofi pour commercialiser le médicament aux États-Unis sous le nom de marque Tzield.
Le diabète insulinodépendant (diabète de type 1) est une maladie auto-immune due à la destruction des cellules bêta du pancréas qui produisent l’insuline par des cellules du système immunitaire, les lymphocytes T. Jusque-là, le seul traitement disponible était l’administration chronique d’insuline, un traitement qui remplace l’hormone qui fait défaut mais qui ne peut en aucun cas agir sur la progression de la maladie, contrairement à la nouvelle stratégie thérapeutique désormais disponible. Cette nouvelle approche est l’application directe de travaux réalisés par des Immunologistes de l’Hôpital Necker-Enfants Malades, Lucienne Chatenoud et Jean-François Bach dans l’Unité INSERM 25 puis à l’INEM. Lucienne Chatenoud et Jean-François Bach ont montré dès 1994 qu’il était possible d’arrêter la progression du diabète de type 1 dans un modèle expérimental spontané de la maladie, la souris non-obèse diabétique ou NOD par un anticorps monoclonal dirigé contre la molécule CD3 connue pour rôle central dans la fonction des lymphocytes T. Fait remarquable, la grande majorité des souris guérissaient après seulement une semaine de traitement jusqu’à la fin de leur vie.
Les premiers essais cliniques chez l’homme ont débuté dans les années 2000. Une étude de phase 1-2 réalisée aux USA par Kevan Herold et Jeff Bluestone et le premier essai de phase 2 (contre placebo) en Europe sous l’égide de Lucienne Chatenoud. Les résultats de ces études toutes deux publiées dans le New England Journal of Médicine montrèrent que le court traitement par anticorps anti-CD3 pouvait être utilisé avec succès chez les patients présentant un diabète de type 1 avec hyperglycémie d’origine récente. Puis, une nouvelle étude de phase 2 contre placebo, entreprise sous l’égide du consortium de diabétologie pédiatrique TrialNet aux États-Unis a consisté à administrer le court traitement par anticorps anti-CD3 Téplizumab non pas chez des patients déjà hyperglycémiques traités par insuline mais chez les enfants et adolescents à haut risque de développer la maladie (l’hyperglycémie) et de nécessiter un traitement par insuline ; des enfants appartenant à des familles de patients diabétiques. De façon remarquable, les résultats publiés en Août 2019 toujours dans le New England Journal of Médicine montrèrent un retard dans l’apparition du diabète d’au moins deux ans chez les enfants traités par l’anticorps, une différence hautement significative.
Perspectives
Il est intéressant de reprendre les mots du Dr Anderson, médecin pédiatre, interviewé par le New York times après l’annonce de la FDA : « Le diabète de type 1 apparaît généralement dans l’enfance ou à l’adolescence lorsque les patients sont soudainement fatigués tout le temps, urinent fréquemment, boivent de grandes quantités d’eau et perdent du poids. Avec un diagnostic de diabète, leur vie est complètement changée. Ils doivent mesurer leur glycémie et prendre de l’insuline pour le reste de leur vie. Chaque fois qu’ils prennent un repas, ils doivent calculer la quantité d’insuline dont ils ont besoin. S’ils en prennent trop, ils peuvent s’évanouir ou avoir une crise ou même se retrouver en soins intensifs. Ils sont également confrontés au spectre de complications – une maladie oculaire pouvant entraîner la cécité, une insuffisance rénale, une maladie cardiaque et un accident vasculaire cérébral. Sans un bon contrôle de la glycémie, des complications peuvent survenir dès cinq ans après le diagnostic.
Ce nouveau traitement ouvre la porte, de la même manière que la première immunothérapie contre le cancer a été une percée vers une nouvelle ère de traitement. On s’attend à ce qu’à mesure que l’immunothérapie du diabète s’améliore, la maladie puisse être stoppée avant qu’elle ne puisse s’installer. »
Ainsi, un nouveau paradigme dans le traitement du diabète de type 1 se fait jour avec la possibilité d’une véritable prévention. Bien sûr, demeure le défi d’identifier les sujets à risque avant d’administrer le traitement. Cela est tout à fait possible par des tests simples de sérologie permettant de détecter les autoanticorps contre les cellules bêta produisant l’insuline. En fait, de grands programmes de prédiction sont déjà en cours à relativement grande échelle dans de nombreux pays comme les USA, l’Allemagne et le Royaume Uni. Ainsi pourrons nous éviter la survenue d’une maladie invalidante, certes efficacement contenue par l’insulinothérapie mais dont les effets secondaires à long terme sont importants. En montrant que la progression du diabète de type 1 peut être prévenue par l’anticorps Teplizumab administré deux à cinq ans avant le début de l’hyperglycémie une avancée majeure se présente aujourd’hui pour les patients et leur familles.